Enfin Pris ? de Pierre Carles

" Enfin Pris ? " Pierre Carles Vs Schneidermann

Après l'excellent documentaire " Pas vu pas pris " où Pierre Carles dénonçait les connivences des médias avec le pouvoir, il récidive une fois de plus avec " enfin pris " où il démontre que des gens qui se prétendent critiques face à la télévision ne le sont pas tant que ça.
Enfin un regard critique sur la télévision ?

Ce film frise parfois l'humour, c'est bien monté, on rigole et Schneidermann est encore pire que je ne le pensais.
Lui consacrer un film, c'est peut-être lui faire trop d'honneur mais pour beaucoup, l'animateur d'arrêt sur image représente le symbole de l'intégrité journalistique alors qu'il s'attarde uniquement sur des détails et tape très souvent sur des micro-cibles comme il l'a fait dans un article diffamatoire contre Le Grain de sable dans Le Monde (29 /08/2000), sans même m'avoir contacté. Quel courage ! Il concluait ainsi "
Faut-il réglementer Parialand, ou bien laisser les parias pousser, tout leur saoul, de longs cris anonymes ? (…)
Faut-il continuer de persécuter les parias, jusque dans leur refuge virtuel ? (…)Maudit Internet, qui nous oblige à tout redéfinir : la liberté, les droits de l'homme, et le reste ! " En lisant ceci Schneidermann insinuait que Le Grain de sable était un site illégal ( Il est vrai que nous sommes à époque très consensuelle où la liberté d'expression est de plus en plus réprimée) alors que même Le Nouvel Observateur l'a recensé à propos de l'affaire corse.

Ce film commence par des conversations entre Daniel Schneidermann et Pierre Carles qui seront le fil conducteur.
L'animateur d'Arrêt sur images reprochera à Pierre Carles de l'avoir filmé à son insu sans avertir les téléspectateurs.
Il prend vraiment les téléspectateurs pour des cons. Ils ne sont pas dupes. Ses méthodes n'ont pas l'air de lui plaire, mais Pierre Carles l'avait déjà précisé à l'issu de " Pas vu pas pris " " Les journalistes n'aiment pas qu'on leur fasse ce qu'ils font aux autres. "
Les journalistes d'Envoyé spécial utilisent aussi ces méthodes (tournage en caméra cachée, personnes filmées à leur insu, etc.)

Il est loin l'époque où Schneidermann s'en prenait à Serge July avec son insolence naturelle dans cette fameuse séquence chez Pivot où il lui reproche d'avoir retourné sa veste. Serge July en reste coi.

La séance de maquillage avec Messier est particulièrement meurtrière pour Schneidermann lorsqu'il le questionne d'un ton très complice "
On peut vous demander quelques chiffres sur Vivendi ?
N'ayez pas peur, on en a juste besoin pour la présentation, ce n'est pas pour l'antenne. Ce sera plus glamour… "
Effectivement cet Arrêt sur images était vraiment glamour ; on y a discuté Sandwich, trous de chaussettes….

Autre personnage, autre traitement : Pierre Bourdieu.
Un mythe de la gauche bien-pensante.
Invité à Arrêt sur image il nous présente l'émission " La Marche du siècle " où un gréviste n'arrive pas exprimer sa pensée et Cavada est heureux de le mettre en échec.
Cavada présent sur le plateau sera aussi infect qu'avec le gréviste, interrompant Bourdieu tout en prétendant le laisser parler.
Sa réaction confirmera les thèses de Bourdieu.

Mais Pierre Carles veut en faire de trop.
Il explique que Bourdieu avait en face de lui des contradicteurs et Messier aucun, laissant croire que l'émission avec l'ex-patron de Vivendi était la seule exception alors que d'autres émissions avec invité unique ont existé, José Bové, par exemple.

La fin est carrément délirante.
Pierre Carles propose à Daniel Schneidermann de consulter un psychanalyste pour le besoin de son film.
Evidemment il refusera.
A la place c'est Pierre Carles qui s'allongera sur le divan et se prêtera au jeu de l'analyse.

Arrêt sur images exploite les failles des autres reportages pour se mettre en avant mais il ne faut surtout pas oublier que c'est un spectacle médiatique.
Ce qui insupporte chez Pierre Carles ce n'est pas sa vision stalinienne des médias, c'est d'avoir la candeur d'attendre autre chose de la télévision et de ses stars.